Le 28 septembre 1958, le peuple de Guinée votait NON au référendum gaulliste proposé par la Métropole française. Ce fut le choc entre deux hommes au destin opposé, l’un ragaillardi par ses prouesses militaires pendant l’occupation prussienne, et l’autre enivré par le vent et l’ère de la justice pour la souveraineté de son peuple. Le premier fut un grand homme pour la France et le second le défenseur des peuples épris de justice et de liberté.
Le 28 septembre 2009 a été un des jours les plus sombres pour le vaillant peuple de Guinée. C’est le jour où une soldatesque avinée et droguée a semé la panique au stade du 28 septembre, tirant et poignardant sur des civils désarmés et sans défense. Plus d’une centaine sera tuée, des centaines de blessés et des dizaines de femmes violées.
Le 28 septembre 2022 a été choisi comme date pour le lancement du Procès des massacres du 28 septembre 2009. Est-ce une coïncidence ou un accident de l’histoire si ces événements corroborent à cette même date ? L’un dans l’autre, il faut retenir que le mois de septembre est témoin en Guinée de plusieurs événements à la fois heureux ou douloureux, c’est un 5 septembre qui a vu la chute du Pr. Alpha Condé.
Effectivement, le procès des massacres du 28 septembre a débuté ce mercredi 28 septembre dans un palais de justice flambant neuf construit pour la circonstance. De nombreuses personnalités étaient présentes ainsi que plusieurs observateurs qui ne voulaient pas se faire conter cette cérémonie. Ce qui s’est passé dans cette salle était pathétique et émouvant. Toumba Diakité qui retrouve Moussa Dadis Camara, Claude Pivi, Tiégboro etc. se retrouvent face à un juge pour décliner leur identité. Cela fait penser aux animaux malades de la peste de La Fontaine : « Selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de cour vous rendront blanc ou noir ». Incroyable mais vrai des hommes jadis très forts dont le simple regard était insoutenable, se retrouvent ramollis et dociles face à la force de la loi. Alfred de Vigny dans la mort du loup dit : « A voir ce que nous fûmes sur terre et ce que nous laissons après nous, seul le silence est grand tout le reste est faiblesse… »
Ce procès a plusieurs significations pour le peuple de Guinée c’est avant tout :
Une prouesse du CNRD qui réussit à mettre en œuvre le procès d’un événement vieux de 13 ans. Ce mérite lui revient et il faut le saluer.
C’est aussi la fin de l’impunité dans le pays car à voir un ancien Président à la barre est réellement significatif.
C’est également une leçon de vie pour tout le peuple de Guinée, surtout ceux qui sont aujourd’hui aux affaires et qui abusent de leur pouvoir.
Le CNRD a mis sur pieds des institutions qui ne manqueront pas de le rattraper face à certaines dérives qui sont aujourd’hui comptabilisées par le peuple. La CRIEF a de potentiels prévenus parmi les nouvelles autorités qui n’ont jamais voulu déclarer leurs biens avant leur entrée en fonction. La cour pénale également aura à faire la lumière sur les assassinats du 5 septembre 2021 car, le peuple veut réellement connaitre ce qui s’est passé au palais présidentiel. Quand on peut accomplir sa promesse sans manquer à la justice, il faut tenir sa parole car, un coupable puni est un exemple pour la canaille.
« La Justice c’est le respect de la dignité humaine en quelque personne et dans quelque circonstance qu’elle se trouve compromise et à quelque risque que nous expose sa défense ». Ce procès sera long car il mettra en exergue plusieurs inconnus dont la mise en évidence entrainera de chaudes empoignades entre les hommes de la robe. « Il faut demeurer d’accord à l’honneur de la vertu que les plus grands malheurs des hommes sont ceux où ils tombent par les crimes qu’ils sont censés commettre ». Cette cour représente aux yeux du monde la valeur de la justice guinéenne et la capacité de nos juges à démêler un enchevêtrement aussi inextricable que les événements du 28 septembre 2009. Comme le dit l’écrivain russe Léon Tolstoï : « Aujourd’hui des forfaits impossibles sous les Néron se commettent sans qu’on puisse en accuser personne. Les uns ont demandé, les autres ont proposé, les troisièmes ont rapporté, les quatrièmes ont décidé, les cinquièmes ont confirmé, les sixièmes ont ordonné et les septièmes ont exécuté ».
Que Dieu éclaire et guide la cour dans ce procès historique !
MAM CAMPBELL JOURNALISTE INDÉPENDANT ET ACTIVISTE CONSULTANT EN COMMUNICATION