Dans une douleur indescriptible et une consternation profonde, je m’attelle à un dur exercice, celui de parler de ma sœur au passé, devoir de témoignages m’y obligeant.
Mariama CAMARA et moi, cest une tres longue histoire, mais pas assez longue pour le temps qu’on aurait souhaité encore passer ensemble.
Nous nous rencontrames au milieu des années 70 au campus de l’université gamal Abdel Nasser. Elle en bio-chimie et moi en maths-physique.
Nos relations furent tout naturellement amicales d’abord et devinrent fraternelles, pour toujours, comme issus des mêmes parents biologiques.
Depuis cette date, Mariama et moi ne nous sommes plus séparés, jusqu’à cet
inoubliable 13 janvier 2025, par la volonté du Tout Puissant Allah, Clément et Miséricordieux.
En apprenant ce 13 janvier 2025 son décès survenu au Maroc, d’innombrables souvenirs défilèrent dans ma tête en un laps de temps.
Des souvenirs amicaux, familiaux, associatifs, administratifs, politiques.
Les uns plus beaux que les autres.
Dès nos premières rencontres, je sentis en cette dame l’amour profond pour les siens, la considération pour chacun et l’attention pour tous, humaniste dans l’âme.
Tenez!, Jeune étudiant et fougueux, je fus conduit au camp Boiro en 1976, pour une banale histoire de protestation face à un cas d’injustice.
Dès mon incarcération, Mariama abandonna tout, jusqu’à à mon placement sous contrôle judiciaire matin et soir , grâce aux precieuses interventions de Siaka TOURÉ et de Toumany SANGARE ( le père de Kader SANGARE), paix à leurs âmes.
Je mis cette période à profit pour partir du pays, craignant de retourner une autre fois au camp Boiro.
Je suis resté de longues années à l’extérieur, entre Abidjan, Niamey , Grenoble, Paris ,puis le Mans, avant de rentrer au pays au milieu des années 80, après la mort du Président Ahmed Sekou TOURÉ.
Mariama était à l’époque en service à la SOBRAGUI.
Nos retrouvailles furent toujours des occasions de rappeler nos souvenirs que les plus jeunes autour de nous écoutaient avec
beaucoup de plaisir.
Lorsque je decidai de rentrer définitivement au pays , Mariama avait été nommée Directrice Générale de la SOGUIPAH, et avait fondé une famille avec Camille FERNANDEZ, pilote de ligne.
Je fus nommé conseiller juridique de l’administration et Contrôle des Grands Projets ( ACGP), avant d’en devenir l’administrateur Général en 1997.
Pendant ce temps, Mme FERNANDEZ Mariama CAMARA avait commencé à poser ses marques dans la naissante société d’industrie agro-alimentaire dont la gestion lui avait été confiée.
Elle réussit à faire de cette entreprise, un véritable fleuron de l’industrie guinéenne dont le nom lui était associé jusqu’à son dernier
soupir . Elle n’était connue désormais que sous l’appellation “MARIAMA SOGUIPAH”.
Elle fit de ses fonctions à la SOGUIPAH un moyen d’être au service du pays, une perche tendue aux nécessiteux et des bras ouverts avec un cœur qui battait au rythme d’une disponibilité inegalable et d’une affabilité à nulle autre pareille.
Aucun superlatif ne peut décrire l’ambiance que cette dame servait à toutes les personnes se rendant à son domicile. Des personnes de conditions sociales différentes, de situations financières diverses, d’obediences politiques opposées, d’appartenances ethniques et religieuses différentes.
Chacun était le bienvenu chez elle et nul ne devait repartir de là sans vouloir y retourner le lendemain.
Plusieurs compatriotes ont été témoins de ce je décris: Sankhon Ibrahima Sorel ,Abdoulaye Cheri Camara, Aïcha Barry, Dr Moussa Kanté,
Jean Paul Sarr, Me Dinah Sampil ,Noël Douet, Dominique Traoré; pour ne citer que ceux-là.
Pour ma part, MARIAMA SOGUIPAH fut d’un soutien inestimable lors de mon long séjour au Ministère du tourisme, de l’hôtellerie et de l’artisanat, en qualité de Secrétaire Général.
Par son concours, je ressentis , subis ( en réalité) moins ce qui était une punition administrative pour des raisons politiques.
J’habitai, gratuitement, des années durant, sa maison à Ratoma. Sans compter tous les autres avantages qu’elle nous offrait, ma famille et moi.
Nul ne devait le savoir,; en tout cas, ni par les propos ni par les faits et gestes de
MARIAMA SOGUIPAH.
Elle savait donner avec la main droite, à l’insu de la main gauche. C’est bien cela l’altruisme décrit dans les livres saints.
MARIAMA SOGUIPAH, Abdoulaye Chéri CAMARA et Moi formons un trio qui voit la seule femme de notre groupe tirer sa révérence loin du pays.
Elle nous laisse, Abdoulaye chéri et moi, orphelins de son calme et de ses précieux conseils.
Pour les services rendus à la Nation, pour l’attention accordée aux siens et les obligations accomplies envers notre créateur, je prie pour le repos de l’âme de ma sœur et promets de lui rester éternellement reconnaissant.
Je tâcherai d’être là pour Camille, Jean Louis , Marie Angelique et Gérard, jusqu’au jour où Dieu nous rappelera à lui.
La mort n’arrête point l’amour chère sœur.
Repose toi maintenant et repose en paix, confidente.
Malick SANKHON
Juriste/Médiateur
Président de la COBAG